Un repas, aussi frugal soit-il, est un instant de rencontre. Il peut être une occasion de joie et de communion, unissant profondément les gens.
Elise Boulding
Lectoure (F)
Agapè du Gers (F)
étape 28 | jour 33
47.4 km
7 h 58
717 m↑
Description
Après une bonne nuit de sommeil, on prend notre déjeuner avec les autres pèlerins dans l’ancien salon du château, c’est vraiment la classe ! Et on n’a pas tant dépassé notre budget journalier que ça, on s’habituerait presque à un voyage de château en château avec nos fiers destriers, mais je m’égare.
C’est donc après avoir joué les châtelains le temps d’un jour que vers 10h, on se remet en selle en prenant bien soin de planifier notre itinéraire en dehors de chemin boueux. Pour descendre de la butte de Lectoure, on emprunte donc la D7 qui nous fait également franchir plusieurs cours d’eau dont le Gers. Une fois ces obstacles traversés, on quitte cette route un peu trop fréquentée par les voitures pour rejoindre au sommet d’une petite colline une petite route de campagne sur la ligne de crête, que l’on suivra jusqu’à Marsolan. On en n’avait pas parlé jusqu’ici, mais le passage dans les vignobles se fait depuis deux -trois étapes au son des canons dont le bruit est censé faire fuir les oiseaux des cultures. Au tout début, on a d’abord pensé à un chasseur mais, au vu du nombre de « coup de feu » et au vu du peu de chasse à manger le soir … on s’est vite douter que cela ne collait pas.
A l’entrée de Marsolan se trouve un magnifique belvédère avec vue sur toute la vallée. D’ailleurs un petit groupe de pèlerins profite déjà de la petite place de pique-nique sous un marronnier, dont le fruit commence à peine à être visible.
Pour rejoindre le prochain petit village, nous évitons l’itinéraire pédestre pour privilégier le bitume de la D166. Cette dernière, arrive à La Romieu qui semble vivre uniquement du Camino avec ses innombrables petits commerces, épiceries, gites et maisons d’hôtes. Toutefois, en ce frais dimanche de mai, seuls les pèlerins occupent le village qui est très calme et les nombreuse chaises inoccupées attendent la foule de l’été à venir. Un sculpteur local a également disséminé des chats sculptés un peu partout dans le village, saurez-vous les trouver ?
Pour se rendre à Condom (et encore cher lecteur, tu n’as pas vu le nom de la rivière qui traverse le ville 😊) en évitant les chemins de terre boueux, pas le choix, il faut emprunter la D41. Ensuite, juste avant d’entrer dans Condom, on emprunte quelques chemins de traverse pour éviter la grande route fréquenté et on pénètre, sans mauvais jeu de mot, dans la ville par la D7. Nous faisons les obligatoires photos devant la fameuse statue des 3 Mousquetaires et prenons un café sur la place. On profite de cette pause pour rechercher un hébergement. On rencontre à nouveau le même problème que hier, mais après cinq – six appels, on finit par trouver. Ouf !
C’est donc avec notre destination en tête que nous quittons Condom en traversant la Petite Baïse (si, si c’est vrai le nom de la rivière !) pour s’engager sur l’ancienne voie ferrée transformée en voie verte. Puis, à la hauteur de Couchet, on quitte l’autoroute cycliste pour grimper en direction de Larressingle, où nous rejoignons à nouveau le tracé du Camino. Le village est centré autour d’un ancien château-fort du Moyen-âge en très bon état. A l’intérieur on y trouve boutiques, glaciers et restaurants, ainsi que l’office du tourisme où on peut faire tamponner sa crédencial (alternativement dans la chapelle se trouve aussi le tampon, ce qui est assez rare pour être souligné). Seule une poignée de visiteur occupe le lieu. Néanmoins, on apprendra plus tard que c’est le monument le plus visité du Gers avec 180 mille visiteurs par année. On nous recommande le glacier mais le temps frisquet ne donne pas vraiment envie d’une glace.
Avant de sortir de l’enceinte fortifiée, nous avons droit à un cours d’histoire particulier par un guide-conférencier sur les pèlerins au 14ème siècle, le tout en présence de monsieur le Maire. On y a ainsi appris que l’origine de l’expression « Apporter sa pierre à l’édifice » venait du fait que les pèlerins contribuaient à construire les édifices religieux le long du parcours en apportant une pierre à la fois en signe de dévotion. Les gens peu fortunés devaient également gagner de l’argent au cours de leur périple, ainsi il n’était pas rare de s’arrêter à un endroit pour travailler et gagner ainsi de quoi continuer sa route. Bien entendu, les plus riches, eux, disposaient même souvent d’un cavalier avec un jour d’avance qui organisait les hébergements pour le seigneur, le plus souvent dans les châteaux et places fortes. C’est un peu comme aujourd’hui, on a rencontré des jeunes étudiants qui campent sur le chemin et d’autre qui vont d’hôtel en hôtel. Il est également à noter qu’il n’est pas nécessaire de faire le chemin à pied pour être un « vrai » pèlerin, il y avait des voyageurs à cheval, avec des ânes ou même en chariot. L’exception étant bien entendu le pénitent qui lui devait se faire pardonner une faute.
Le cours terminé, on redescend la colline du château direction le pont d’Artigue, classé Unesco. Spoiler alerte : il y a vraiment plus impressionnant comme pont, mais bon, il permet au pèlerin de traverser le petit ruisseau les pieds au sec. Juste avant le pont, à quelques mètres de la route D278 se trouve la borne des 1000 km, un selfie s’impose! Ensuite, nous prenons le chemin cyclable le plus court en direction de l’hébergement car il est déjà bientôt 18h, avec toutes ces péripéties, on n’a pas vu le temps passer !
Le gite et maison d’hôtes l’Agape du Gers est situé le long du tracé du Camino, il est facile à trouver. Notre arrivée en vélo déconcerte quelque peu la maitresse de maison qui ne doit pas avoir l’habitude de recevoir des pèlerins à vélo. La question centrale est de savoir si on peut transporter nos sacoches en chambre ou non à cause des punaises de lit. Finalement, un compromis se trouve, les sacoches resteront entre la fenêtre et les volets de la terrasse. Le souper est à 19h donc, pas le temps de trop trainer !
Le soir, nous avons droit à notre premier souper communautaire avec une dizaine d’autres pèlerins et nos deux hôtes. Ces derniers, après avoir parcouru le Camino du Puy à Santiago une semaine à la fois en neuf années, décidèrent de quitter Paris pour ouvrir un Gite sur le GR 65 et d’accueillir les pèlerins dans « l’esprit du Chemin ». D’ailleurs, ils font partie de l’association les « haltes vers Compostelle » qui prône ce type d’hébergement. On a très bien mangé avec, pour la première fois depuis longtemps, des légumes en ratatouille et de la saucisse. le tout servi avec du vin de liqueur d’Armagnac et du vin rouge de la région de Gascogne pour le repas. Après un tour de table ou chacun s’est présenté et a dit d’où il venait, on y a également beaucoup discuté du chemin. Bien sûr, notre aventure à vélo détonne et intrigue beaucoup nos compagnons d’un soir. De plus, nous faisons la connaissance de notre premier compatriote, un suisse-allemand de Büren an der Aare qui fait le chemin du Puy à Saint Jean, après avoir fait la Via Gebennensis l’année précédente et avec l’intention de faire le Francès ou le Norte l’année suivante. Il y a aussi un autre pèlerin qui vient de parcourir la voie du Vesely et qui remonte à l’envers sur la Via Podiensis. Les autres marcheurs font tous le Camino par segments.
C’est enchanté par ce dîner et fatigué par cette très riche journée que nous allons nous coucher.
Buen Camino !
Le parcours en video
L’Agapè du Gers / 120 € /nuit (en demi-pension inclus boissons)
Note : 6 / 6 | prix pèlerin – diner communautaire entre pélerins, garage à vélo
Les vélos sont dans le garage de la propriété
Souper au gite
Timbre à l’office du tourisme de Larressingle et au gite
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