Expédition Ultreia – Étape 35 | Jour 42 – Mardi 04.05.2024

Guide du Pèlerin (XII siècle)

Dans le pays basque, la route de Saint-Jacques franchit un mont remarquable appelé Port de Cize…pour le franchir, il y a huit milles à monter et autant à descendre. En effet ce mont est si haut que celui qui en fait l’ascension croit pouvoir de sa propre main toucher le ciel.

Saint-Jean-Pied-De Port (F)

Roncesvalles (ES)

étape 35 | jour 42

29.5 km

8 h 29

1452 m↑

Description

Depuis Saint-Jean-Pied-De-Port, la plupart des marcheurs partent tôt, entre 6h et 7h. Nous, on n’a aucune raison de se presser : d’après les panneaux indicateurs, il faut 6 heures 30 à pied pour se rendre à Roncesvalles. Comme aujourd’hui, il ne faut pas s’attendre à de fortes chaleurs, nous ne comprenons pas bien cet empressement pour un départ si matinal… si ce n’est peut-être l’impatience du départ, car pour beaucoup, c’est leur première étape. Pour notre part, en vétérans du Chemin, nous franchissons les remparts de la vielle-ville vers 9h30 après un bon petit-déjeuner.

L’ascension se fait sur la fameuse Route Napoléon. Cette dernière est parfaitement goudronnée et carrossable, toutefois avec nos vélos chargés, il y a plusieurs passages où la pente est trop importante et nous devons donc pousser nos montures. A peine sortis de la ville,  un « gang » d’une vingtaine de scooters et mobylettes rétros nous rattrape : leurs moteurs sont à plein régime pour gravir péniblement la côte, ils font un bruit d’enfer en laissant derrière eux un incommodant nuage bleuâtre.

Comme la majorité des pèlerins sont partis tôt, nous n’en croisons qu’une petite dizaine dans la première moitié de l’ascension, dont un couple d’Irlandais qui débutent justement leur périple. On se fait également dépasser à tout allure par deux vélos de course. Etonnamment, la route est empruntée par un peu plus de voiture qu’attendu … mais où vont-ils tous car, en principe, il n’y a rien là-haut?

Le mystère s’éclaircit à 780 m, où se trouve l’auberge Orisson : certains y viennent en voiture pour manger, d’autres font transporter leurs bagages, d’autres encore se font ramener en taxi,… L’auberge constitue le dernier ravitaillement avant Roncesvalles, d’ailleurs certains pèlerins décident de couper leur première étape en y faisant halte pour la nuit. De notre côté nous commandons une part de gâteau Basque et un verre de jus d’orange frais, nous nous régalons même si les prix font penser à chez nous 😊. Pendant notre pause, une petite dizaine de Vautours chauves tournent au-dessus du refuge et font quelques beaux passages à basse altitude. C’est notre première rencontre avec cet oiseau, qui ne semble pas très peureux. Quelle taille, quelles belles ailes digitées !

Après Orisson, la route commence à longer la ligne de crête et le dénivelé s’assagit, ce qui nous permet à nouveau de remonter en selle. Le soleil n’est pas encore arrivé ce  qui nous offre le luxe de faire la montée sans souffrir de la chaleur car, à plus de 1000 m, il fait un agréable petit 20°C. D’ailleurs, les nuages s’accrochent toujours et encore aux sommets des montagnes et créent ainsi une ambiance mystique où les troupeaux de moutons et chevaux, qui pâturent librement,  apparaissent et disparaissent de manière fantomatique dans la brume. C’est dans cette ambiance que soudain, nous apercevons deux vélos de voyage équipés de sacoches à l’avant et à l’arrière, ainsi que leurs propriétaires en train de pique-niquer sur quelques grosses pierres non loin de la chaussée.

Nous nous arrêtons : eux viennent du sens inverse et on subit le brouillard toute la matinée, c’est seulement maintenant qu’ils commencent à avoir une vue dégagée, ce qui les réjouit. Nous sortons également nos sandwichs et commençons à discuter. Le couple de jeunes retraité français, prénommé Nathalie et Pascal, sont venus de Bretagne à vélo et sont maintenant en train de remonter la France en direction des Cévennes et de l’Aubrac. Nous parlons beaucoup de nos expériences de cyclotouristes et échangeons quelques trucs et astuces. Très belle rencontre, ce fut un grand plaisir de faire leur connaissance !

Nous repartons car il nous reste encore 400 mètres de dénivelé positif : heureusement, on peut toujours rouler. Ce n’est que depuis la croix de Thibault qu’il faut quitter le bitume pour emprunter un petit sentier de montagne…et là, il faut pousser dans une forte pente parmi les cailloux. Mais heureusement, rien d’insurmontable pour les forçats du Chemin que nous sommes désormais. Heureusement après 300 mètres un peu difficile une fois arrivés au petit col, où se trouve un refuge d’urgence complètement délabré, un petit chemin de montagne prend le relais et nous pouvons même rouler! Ce dernier longe la frontière franco-espagnol avant de passer devant la fontaine de Roland et d’entrer définitivement en Navarre, comme l’atteste une monumentale stèle en pierre. Le soleil commence à prendre le dessus sur les nuages, les trous de ciel bleu s’agrandissent..

Du côté espagnol, le chemin s’élargit encore un peu et devient même carrossable (pour des véhicules tout terrain). De plus il y régulièrement des bornes pour appeler au secours et offrant même du wifi gratuit 😊. Plus loin, les refuges de secours eux-aussi s’améliorent et ressemblent à de petite maison de montagne. Alors qu’on se réjouit déjà d’arrivé au sommet, le Chemin nous réserve un ultime obstacle : la route, certainement labourée par un troupeau de moutons, est transformée en champs de boue sur une centaine de mètres. Et là, pas d’échappatoire, il faut patauger ! On se mouille donc les pieds et les roues. Heureusement, ici la terre n’est pas amoureuse comme dans le Quercy et l’obstacle est vite franchi, avec beaucoup moins de « dégâts » qu’imaginé.

Enfin, après l’ultime côte où il faut à nouveau pousser, on arrive au col Leopoeder (1420 mètres). On y fait une petite pause pour manger un fruit car cela creuse de gravir les montagnes. On y admire aussi la vue car, entretemps, les nuages et le brouillard se sont complètement dissipés nous laissant un magnifique ciel bleu ! La descente en direction du col de l’Ibañeta, là où arrivent les voitures depuis Saint-Jean-Pied-de-Port, se fait sur une petite route de montage dont le revêtement approximatif et les nombreux gravillons nous imposent une descente prudente lors de laquelle il faut bien se concentrer sur le pilotage. La route offre également quelques magnifiques points de vue notamment sur la Collégiale de Roncesvalles dont on aperçoit les caractéristiques toits gris au milieu des arbres, au bas de la descente.

Au col on rejoint donc la N-135, que nous empruntons tel un toboggan et à pleine vitesse pour arriver à Roncesvalles. Comme d’habitude, nous n’avons pas de réservation. Agnès tente sa chance à la casa Sabrine, qui d’après internet à une chambre… mais ce n’est pas le cas.  Elle passe donc à l’établissement suivant, l’Hôtel Roncesvalles… on monte en gamme 😊 Mais il leur reste un appartement, il est déjà 18h, on le prend. On reçoit donc un magnifique et grand deux pièces avec cuisine au deuxième étage de ce bâtiment historique. On se douche et allons souper au restaurant de l’établissement. Là, on revoit avec surprise la pélerine de Lausanne rencontrée à Navarrenx qui a mis a profit nos deux jours de repos pour nous rattraper.

Ce fut une superbe étape, et on ne regrette absolument pas de n’avoir pas succombé aux sirènes de la route du col, ni à celle du tracé de l’eurovélo 3, même si cela s’est fait au prix de quelques efforts supplémentaires. De plus le parcours ne présente aucune difficulté particulière au niveau de la montagne, il n’y a jamais de vide, ni de passage scabreux. Beaucoup de marcheurs redoutent cette partie du Chemin mais, de notre perspective suisse, il n’y a vraiment aucune raison de s’en faire. Bien entendu, si les conditions météorologiques sont mauvaises, il faudra se méfier surtout en cas d’orage sur les crêtes. Dans le film « the Way » le fils du personnage principal fait une chute mortelle lors de cette étape. Par ce chemin ,en tout cas c’est pratiquement impossible, mais cela suffit à inquiéter beaucoup de randonneurs.

Buen Camino !

Le parcours en video

Hôtel Roncesvalles / 146 €*/nuit (avec pdj) – Super wifi, grand appartement et sdb, cadre chargé d’histoire. *appartement pour 3 lits

Note : 6 / 6

Les vélos sont au local à vélo

Souper à l’hôtel, super menu du soir simple, bon et en quantité adapté au marcheur, cela change de la cuisine française raffinée mais mal adapté pour tous les jours

Timbre à l’office du tourisme de Roncesvalles et au refuge Orisson

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